Des échanges non marchands : l’économie au service de l’homme, loin de s’opposer à l’humain, elle s’accorde à ses besoins fondamentaux.
Karl Polanyi a mis l’accent sur l’importance historique de l’encastrement de l’économie dans la société, c’est-à-dire l’inscription de l’économie ainsi définie, dans des règles sociales, culturelles et politiques qui régissent certaines formes de production et de circulation des biens et services.
Le progrès du marché ne signifie pas la disparition des formes d’économie basées sur la redistribution et la réciprocité :
– la redistribution est le principe selon lequel la production est remise à une autorité centrale, l’Etat, qui a la responsabilité de la répartir, ce qui suppose une procédure définissant les règles des prélèvements et de leur affectation
– la réciprocité caractérise la relation établie entre des groupes ou personnes grâce à des prestations qui ne prennent sens que dans la volonté de manifester et de renforcer un lien social entre les parties prenantes.
Il y a relation réciproque là où des services sont rendus sans contrepartie mais avec la tranquille assurance que la réciproque serait évidente en cas de besoin.
Redistribution et réciprocité perdurent en conséquence au sein des économies modernes dans des échanges non marchands et non monétaires :
La redistribution publique témoigne dans sa construction même d’un « encastrement de l’économie » dans la politique.
Les échanges dits « non marchands » de services gratuits ou quasi gratuits reposent sur le principe de solidarité collective et sont financés par les prélèvements obligatoires.
En témoignent la gratuité de nombreux services : éducation, accès aux bibliothèques, à certains musées, aux soins gratuits pour les personnes insolvables, etc.
Le maintien de relations de réciprocité traduit parallèlement « un encastrement de l’économie » dans la culture.
Les dons ont une importance croissante aujourd’hui dans notre société. Aujourd’hui, il y a des « échanges don » qui résistent à la logique du marché : don du sang, dons d’organes. L’échange don participe ni plus ni moins à l’expression du lien de parenté, et par delà, au lien social.
Les solidarités familiales s’intensifient dans un contexte d’allongement des études, de difficultés d’insertion dans le monde du travail, de difficultés professionnelles des plus de 50 ans.
La vitalité des solidarités communautaires est également une preuve du maintien des relations de réciprocité. Ces dernières formes de solidarité appartiennent à l’économie solidaire. En témoignent les associations, les mutuelles, les coopératives et le système d’échanges Locaux (SEL).
Au sein de l’activité marchande, la prééminence de l’humain
Des relations non marchandes dans l’entreprise
La relation entre le travail accompli et le travailleur se traduit par le prix du travail : le salaire. On peut alors parler d’activité marchande au sens libéral du terme dans la mesure où le travailleur offre sa force de travail et que l’entreprise la lui demande en contrepartie de ce salaire.
Mais le travailleur n’agit pas seulement en fonction du niveau de son salaire, d’autres motivations peuvent le stimuler et déterminer les relations qu’il entretient avec son entreprise : la recherche d’une promotion, le désir de s’insérer dans le tissu social de son unité, la prise en compte d’autres facteurs que ceux de son intérêt personnel, facteurs fondés sur les valeurs qu’il a intériorisées, telle que la solidarité.
Quant à l’entreprise elle-même, elle instaure des espaces d’échanges non marchands : la pause café, la fête de Noël, les vacances pour les enfants du personnel, etc. Le service du personnel d’une entreprise (les ressources humaines) sait à quel point l’attachement du travailleur à son entreprise dépend bien souvent davantage des relations qu’il entretient avec son entourage (collègues, hiérarchie…) que de promotions salariales.
L’économie solidaire dite aussi économie sociale : un mode d’échange alternatif
L’économie solidaire correspond à des activités répondant à des besoins qui trouvent leur satisfaction dans ce qui est appelé « le tiers secteur associatif », c’est-à-dire dans des services pris en charge par des associations, quelques mutuelles, de nouvelles coopératives d’intérêt collectif dans le domaine de la finance (microcrédit), du commerce équitable, de l’environnement, engagées dans le développement des pays du Sud.
L’économie solidaire vise à réaliser des objectifs dont l’utilité sociale est évidente à court terme, et dont l’utilité… économique est non moins évidente… à long terme. C’est la raison pour laquelle un secrétariat d’Etat à l’économie solidaire a vu le jour. Lorsqu’il fut Ministre des Affaires sociales, du Travail et de la Solidarité, François Fillon nomma un conseiller « chargé de la vie associative et de l’économie sociale », Claude Fonrojet, délégué interministériel à l’innovation sociale et à l’économie sociale (Dies).
Dans ce cadre, le Secrétariat d’Etat à l’économie solidaire lanca son appel à projets « Dynamiques solidaires ».