L’État providence a accompagné la croissance exceptionnelle des Trente Glorieuses; cependant, à partir des années 1970, le contexte a changé :
– ralentissement de la croissance économique.
– progression et persistance du chômage.
– ouverture croissante des économies.
– remise en cause du rôle de l’État, sous l’influence de la montée des idées libérales et de l’échec relatif des politiques keynésiennes.
Deux grandes questions se posent :
– La «crise de l’État-providence» rend-elle inutile toute politique interventionniste ?
– L’État doit-il s’effacer devant les forces du marché ?
En fait, le souci de la cohésion sociale oblige à repenser le rôle de l’État pour le XXIéme siècle.
L’Etat face à une triple crise : financière, d’efficacité, de légitimité
– une crise financière: malgré l’augmentation du taux des prélèvements obligatoires, les déficits sociaux se creusent
– une crise d’efficacité : des personnes de plus en plus nombreuses passent entre les mailles du filet de la protection sociale
– une crise de légitimité: la montée de l’individualisme s’accommode mal du rôle tutélaire de l’État.
D’autre part, l’ouverture croissante des économies et la construction de l’Union européenne limitent l’autonomie des politiques nationales.
Crise financière : la protection sociale remise en cause par les déficits sociaux
La protection sociale en Europe est fille de la croissance du salariat, de sa reconnaissance sociale et de la place qu’il a su prendre. Elle est aujourd’hui menacée par le chômage, la précarisation de l’emploi et la pression du libéralisme. Le souci de limiter les prélèvements obligatoires conduit à remettre en cause l’universalité des systèmes de protection sociale, quel que soit son fondement. La place de l’assurance privée s’étend au détriment des systèmes publics.
On observe un retour en force de la sécurité individuelle par l’accumulation d’épargne, comme l’illustrent l’essor de l’assurance-vie et le recours aux fonds de pension en matière de retraite. Et ce, au moment où la part de la richesse nationale qui revient au travail salarié baisse au profit des revenus du capital. Le risque est de voir progressivement la protection publique réservée aux plus pauvres, sous forme de prestations dégradées, à la manière des vieilles politiques d’assistance du siècle dernier.
Crise d’efficacité : une protection inadaptée
En terme d’indemnisation du chômage
Notre système d’indemnisation du chômage, qu’il s’agisse du régime de solidarité ou du régime d’assurance, ne s’est pas adapté aux nouvelles règles de fonctionnement du marché du travail.
Il demeure dans son ensemble marqué par ses origines : prise en charge des licenciés pour cause économique et de salariés ayant des carrières relativement stables et longues, protection plus importante des travailleurs privés d’emploi au-delà de cinquante ans.
Les nouveaux risques liés au fonctionnement présent du marché du travail ne sont pas ou sont mal pris en compte : instabilité croissante des emplois et des carrières qui précèdent ou entrecoupent les périodes de chômage, développement des emplois précaires, allongement des processus d’insertion des jeunes.
Associés à ces transformations de la nature même des emplois exercés, les restrictions décidées, suite aux difficultés financières des régimes, ont conduit à une rétractation de l’indemnisation : 46 % environ des demandeurs d’emploi ne sont pas indemnisés aujourd’hui, contre 40 % en 1985.
Crise de légitimité : Le point de vue des libéraux en ce qui concerne la protection sociale
Selon les libéraux, un haut niveau de protection sociale, loin de réduire les « fractures sociales », risque d’avoir pour effet de fragiliser la société en réduisant son adaptabilité et sa capacité à faire front aux difficultés.
La protection sociale jouerait comme un « anesthésiant ». Elle neutralise les tensions, mais relâche aussi les ressorts de la dynamique économique. En faisant naître des comportements d’assistés, elle favorise le développement d’une “léthargie indemnisée “, nuit à l’esprit d’initiative, de responsabilité et de solidarité.